Ségolène Royal a repris sa liberté en amorçant un sérieux virage vers le centre droit, en réaffirmant ses propositions libérales pour la réforme de l’Education Nationale et des universités. Sur France 2 jeudi soir pendant l'émission « A vous de juger », Ségolène Royal a aligné ses propositions sur celles de Bayrou et sur celles du projet UMP en matière d’Education Nationale. Mme Royal a particulièrement insisté sur la nécessité de donner plus de libertés aux enseignants pour qu’ils puissent expérimenter de nouvelles méthodes pédagogiques et ainsi s’affranchir des circulaires du ministère et de l’inspection académique ; une idée très proche de celle du projet UMP qui propose de « garantir la liberté pédagogique des enseignants en les évaluant sur les progrès des élèves et non pas sur les méthodes utilisées » ou de Bayrou : « Le grand corps qu’est l’Éducation nationale a besoin d’autonomie à tous les niveaux, de gestion des ressources humaines, de co-responsabilité, de concertation transparente avec les femmes et des hommes qui font vivre l’Éducation nationale ». Cette proposition de Ségolène Royal implique une plus grande autonomie pour les écoles de la République, une ambition qui est tout simplement inexistante dans le projet du Parti Socialiste car elle est contraire à son idéologie qui préconise un seul type d’enseignement en France : « Un grand service public, unifié et laïc de l’éducation nationale » comme le proposait François Mitterrand dans ses 110 propositions de l’élection présidentielle de 1981.
D’ailleurs sous le président Mitterrand, Mme Royal était Chargée de mission pour les affaires sociales à la présidence de la République (1982-88). Comment peut-on défendre la liberté pédagogique, donc de l’enseignement, sans favoriser l’émergence d’une école libre ? Pierre Frackowiak inspecteur de l'Education nationale, secrétaire à l'éducation de la fédération socialiste du Pas-de-Calais, voit les choses différemment en décriant « la liberté pédagogique des enseignants », comme « alibi des conservateurs, obstacle à la construction de l'Ecole du 21ème siècle » dans une note de l’UNSA Education. Mme Royal va plus loin. Elle veut favoriser les liens entre les entreprises et les écoles « dès le collège pour apprendre la culture du risque et d'entreprendre. Concrètement il s'agira de stages » déclare-t-elle sur France 2 ; une proposition très proche de celle de l’UMP qui veut « diversifier les stages (en entreprise) qui constituent actuellement un puissant facteur de reproduction sociale » et en contradiction avec la volonté du projet du PS de « lutter contre la marchandisation de l’école ».
L’Enseignement supérieur n’est pas épargné par ce virage vers le centre droit de Ségolène Royal. La candidate du PS souhaite en effet plus d’autonomie pour les universités « pour redonner de l'émulation en contrepartie d'une évaluation » et « pour rapprocher les universités des entreprises, et créer des alliances entre les universités et les grandes industries ».
Pour comparaison, l'UMP propose de « réformer la gouvernance des universités et permettre à celles qui le veulent d’expérimenter un réel statut d’autonomie et d’évaluer les résultats des universités, en particulier l’accès de leurs diplômés à l’emploi, rendre public ces évaluations, en informer les étudiants», et de « favoriser la création d’incubateurs d’entreprise dans les universités, qui seraient alors considérées comme zones franches ». Des propositions qui doivent glacer les électeurs socialistes traditionnels si austères à la moindre autonomie pour les établissements publics.
Alors Mme Royal chercherait-elle à séduire l’électorat de Sarkozy ? Non car Mme Royal veut que les diplômes nationaux soient préservés au sein d’une université autonome. Le mot de trop qui trahit son ambition de charmer l’électorat de Bayrou qui propose de « défendre le modèle universitaire français » et ajoute qu’ « il n’est pas question de toucher au statut national des diplômes, la question du degré d’autonomie des universités est posée, en particulier pour les budgets de recherche ». La messe est dite. Le parti socialiste et Ségolène Royal ont clairement ajusté leurs propositions pour réformer l’Education Nationale sur celles de Nicolas Sarkozy et de François Bayrou. On attend avec impatience que Ségolène Royal vante la qualité des établissements scolaires privés pour leur autonomie. Heureusement Mme Royal nous a rassurés samedi soir chez Christine Ockrent en rappelant que le gouvernement Villepin avait « sapé la valeur travail en précarisant les travailleurs », un jargon qui rassurera les électeurs de gauche. On a eu peur que Ségolène vire définitivement à droite !
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