Le Conseil européen de la recherche va distribuer 7,5 milliards d'euros sur six ans.
La bataille mondiale de la recherche va passer par le Conseil européen de la recherche (ERC). Prévue dans le cadre du septième programme cadre, cette structure doit financer des projets pionniers dans tous les domaines de la re cherche fondamentale. On retrouve un peu la même logique qui préside au fonctionnement de l'Agence nationale de la recherche (ANR), lancée voici deux ans en France, mais avec exclusivement des projets dits « blancs » (sans thématique prédéfinie).
« De grandes découvertes scientifiques sont intervenues grâce à l'espace et au temps que l'on a donnés aux grandes idées pour s'épanouir. C'est ce que nous voulons concrétiser avec l'ERC », a lancé le commissaire européen à la Recherche Janez Potocnik. Le seul critère de sélection sera l'« excellence ». Le mot était sur toutes les lèvres, lors de la conférence de lancement de l'institution à Berlin, inaugurée mardi par la chance lière allemande Angela Merkel.
Difficile de ne pas percevoir, parmi les 250 directeurs d'instituts de recherche nationaux participant à l'événement, les espoirs engendrés par une telle initiative.
« Ce type de financement est très attendu par les chercheurs », confirme Michel Cosnard, PDG de l'Inria.
Doté de 7,5 milliards d'euros de 2007 à 2013, l'ERC va distribuer deux types de financements. Dès cette année, 200 bourses d'1,5 million d'euros chacune seront accordées à de jeunes chercheurs, docteurs depuis moins de neuf ans. À partir de 2008, de 200 à 500 allocations de 2,5 millions d'euros seront distribuées à d'autres chercheurs, sans limite d'âge.
Faire revenir les cerveaux
« Cela va favoriser la mobilité », se félicite Angelos Michae lides, jeune chercheur du London Centre for Nanotechnology. En effet, comme il n'existe pas de restriction de nationalité, tout chercheur étranger décidant de venir travailler en Europe peut en bénéficier. « De quoi attirer des cerveaux, voire faire revenir des Français », note Alain Peyraube, direc teur de recherches CNRS au Centre de recherches linguistiques sur l'Asie orientale (EHESS) et l'un des deux membres français du conseil scientifique de l'ERC. La mise en place de l'ERC ne s'est pas déroulée sans débats. Une bagarre a opposé la Commission européenne à plusieurs États membres, dont la France, le Portugal ou la Suède, qui souhaitaient son autonomie.
Finalement, Bruxelles a obtenu gain de cause, l'ERC aura le statut d'agence exécutive. Son conseil scientifique de vingt-deux membres sera présidé par Fotis Kafatos, de l'Imperial College of London.
Dernier débat : 20% des financements accordés à chaque projet seront attribués à l'institution qui l'héberge, pour couvrir les frais notamment d'équipement. « Les Britanniques auraient souhaité davantage, car aux Etats-Unis cela représente 40 à 60 % des budgets », témoigne Mathias Dewatripont, professeur d'Économie à l'Université libre de Bruxelles.
« L'espoir est que cela draine les meilleurs projets, mais les chances de réussite limitées (environ 1 %) risquent de décourager », craint enfin Enno Aufderheide, directeur de la politique de recherche de l'Institut Max Planck, l'équivalent allemand du CNRS. D'autant que « nul ne sera autorisé à cumuler financements ANR et ERC », souligne le directeur général du CNRS Arnold Migus. « Certains pourraient préférer la sécurité, avec l'ANR », redoute de son côté Alain Peyraube.
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