PARIS (AFP) - Géant maritime grâce à l'Outre-mer, la France dispose d'un potentiel de pêche énorme mais sous exploité, en Antarctique ou en Guyane par exemple, souligne l'explorateur Gérard d'Aboville dans un rapport remis au Conseil économique et social (CES) mercredi.
Deuxième puissance maritime en superficie, derrière les Etats-Unis, avec une Zone économique exclusive (ZEE) de 11 millions de km2, la France ne représente pourtant qu'une part infinitésimale (0,62%) des 94 millions de tonnes de poissons pêchés en 2005 dans le monde.
Chargé par le CES de rédiger un rapport sur "la pêche et l'aquaculture en Outre-mer", l'ex-député européen (1994-99) a rendu sa copie. Son constat: les gisements Outre-mer sont gigantesques, à condition de ne pas se limiter à une pêche vivrière et artisanale, le long des côtes, et à développer une pêche hauturière, semi-industrielle voire industrielle.
Citant l'exemple de la Nouvelle-Calédonie, où la capacité de capture a doublé entre 2000 et 2005, avec l'adoption de la pêche à la palangre, ou des Kerguelen et de Crozet, où des armements ultra-modernes exploitent un quota de 6.000 tonnes de légines (poisson à chair blanche des mers australes), Gérard d'Aboville souligne le potentiel de la ZEE française.
Excepté à Saint-Pierre et Miquelon, où la morue est sévèrement rationnée depuis un accord avec le Canada de 1994, ou concernant certaines espèces comme le thon jaune ou le thon obèse, l'Outre-mer français n'a pas de problème de ressources.
En Guyane, 200 espèces sont répertoriées sur le plateau continental, mais très peu sont exploitées. De même, dans l'Antarctique, royaume du krill, l'homme ne prélève que 100.000 tonnes par an pour une ressource estimée à 500 millions de tonnes. Utilisé par l'industrie pharmaceutique et cosmétique ou pour la chimie fine, ce minuscule crustacé est surtout parfait pour l'alimentation du poisson d'élevage.
Dans l'Antarctique toujours, aux Kerguelen, des réserves "énormes" d'algues sont inexploitées, constate M. d'Aboville.
Reste que la pêche Outre-mer est peu rentable, coût du fret aérien oblige. Mais "la transformation des produits pourrait atténuer l'effet d'éloignement des marchés", estime Gérard d'Aboville, soulignant qu'un kilo de poisson fumé représente la valeur de 6 à 7 kg de poisson brut.
Une certitude: les débouchés existent. Y compris localement: le taux de couverture de la consommation par la production n'est ainsi que de 41% en Martinique, 56% en Guadeloupe ou 57% à la Réunion. De même, l'Union européenne a importé plus de 10 millions de tonnes de produits de la pêche en 2003.
"Un marché potentiel existe", à condition pour le secteur de la pêche en Outre-mer de se moderniser, insiste-t-il. Et le navigateur de citer en exemple la pêche à la crevette en Guyane, où la "sélectivité très faible" des engins entraîne jusqu'à 7 kg de rejets pour 1 kg pêché.
Autre piste à développer, selon Gérard d'Aboville: la labellisation des produits, avec notamment l'obtention d'une Indication géographique protégée (IGP) pour la crevette de Guyane.
L'aquaculture enfin peut être une solution rentable en Outre-mer, à l'image de la perliculture en Polynésie, avec une production passée de 30 kg au début des années 80 à 7.695 kg en 2006, dont 90% à l'export, pour 7.000 salariés.
Commentaires