Par Alister Doyle Reuters
NUSA DUA, Indonésie (Reuters) - Un accord "historique" conclu à Bali. Le "Mur de Berlin" qui divisait nations riches et pauvres dans la lutte contre le réchauffement climatique s'effondre. Un "nouveau chapitre" s'ouvre entre Washington et ses partenaires.
Après les éloges qui ont suivi l'accord de Bali, conclu in extremis samedi à l'issue d'âpres négociations-marathon entre 190 pays sous l'égide de l'Onu, il s'agit maintenant de se mettre à la tâche. Et celle-ci s'annonce bien ardue.
"Nous allons avoir deux années terriblement exigeantes, dès janvier", a reconnu Humberto Rosa, qui dirigeait la délégation de l'Union européenne en Indonésie.
Faire entrer dans les faits les intentions affichées à Nusa Dua ne paraît pas chose aisée quand on constate combien les discussions ont été difficiles, les positions tranchées, lors des débats dans la station balnéaire indonésienne.
Un exemple: pendant plus de sept heures, une nuit, les délégués se sont opposés pour savoir si la déclaration finale devait appeler les pays pauvres à "agir" contre le changement climatique ou simplement à "contribuer" au combat. De même, l'expression "réduire les émissions" de gaz à effet de serre (GES) a été évitée.
Partager équitablement le fardeau entre les Etats-Unis, la Chine, la Russie et l'Inde, les quatre pays qui émettent le plus de GES, d'une part, et le reste du monde, d'autre part, sera un véritable casse-tête diplomatique.
Mission d'autant plus difficile que les Etats-Unis auront un nouveau président en janvier 2009 et que d'ici là de nombreux pays attendront d'avoir une idée claire de la future politique américaine.
PREMIERE REUNION AU GHANA
"S'il y a un grand changement dans la politique américaine, je pense que les choses vont s'accélérer afin de respecter les engagements qui ont été pris", a estimé le ministre indonésien de l'Environnement, Rachmat Witoelar.
Une première réunion sur la mise en application de la "feuille de route de Bali" devrait se tenir au Ghana au début de l'an prochain. Chaque année, quatre sessions se tiendront à travers le monde, afin d'aboutir à un accord fin 2009 à Copenhague.
L'opposition des Etats-Unis n'a pas permis de faire figurer dans la déclaration finale de Bali une référence claire à une réduction de 25 à 40% des GES d'ici 2020, par rapport aux niveaux de 1990, dans les pays riches.
"Des réductions aussi importantes, et aussi rapidement, c'est tout simplement impossible", a déclaré James Connaughton, président du Conseil de la maison blanche sur la qualité de l'environnement.
Celui-ci a pourtant salué "un nouveau chapitre" dans la politique de lutte contre le réchauffement - Bush avait en effet toujours refusé de signer le Protocole de Kyoto, par lequel 37 pays riches s'engageaient à réduire de 5% en moyenne leurs émissions de GES d'ici 2008-2012 par rapport aux niveaux de 1990.
Pour Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la convention-cadre de l'Onu sur le climat, l'accord de Bali, que de nombreuses organisations écologistes jugent bien minimaliste, a permis de faire tomber "le Mur de Berlin du changement climatique" entre pays riches et pays pauvres, car Kyoto n'imposait des mesures qu'aux nations développées. Maintenant, tout le monde va devoir prendre part au combat.
Angus Friday, de l'île de la Grenade, qui représentait les intérêts de petits Etats insulaires, a fait entendre une note discordante, ne cachant pas sa déception et estimant que la "feuille de route" aurait pu aussi bien être approuvée par courriel, au lieu d'envoyer par avion (pollueur) plus de 10.000 délégués passer deux semaines à Bali.
Version française Guy Kerivel